Dans le cadre de notre dossier « Expert I.A : La force des algorithmes pour résoudre les énigmes du futur. », Zeinab El Dirani (Data Scientist chez Anapix Médical) a accepté de faire un point sur l’année écoulée et sur les grands enjeux du secteur de l’IA.
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Data Scientiste – R&D en Imagerie Médical chez Anapix Médical, une société spécialisée dans la prévention et le dépistage précoce des cancers de la peau en utilisant l’IA
Quelles sont les dernières avancés et innovations dans le domaine de l’IA qui ont retenu votre attention récemment ?
Travaillant dans le domaine de l’imagerie médicale, les améliorations apportées aux GANs (Generative Adversarial Networks) pour la synthèse d’images médicales ont particulièrement retenu mon attention. Cette innovation offre une réponse aux défis liés à la collecte et à l’utilisation des données médicales en France. Ces réseaux permettent de générer des images médicales synthétiques de haute qualité, ce qui diminue le besoin de vastes ensembles de données réelles, souvent difficiles à collecter en raison des contraintes éthiques et légales. Cette méthode permet non seulement d’augmenter les données disponibles pour l’entraînement des modèles d’IA sans compromettre la confidentialité des patients, mais également d’améliorer la précision des diagnostics automatisés en enrichissant les données d’entraînement avec des variations diversifiées.
Quels secteurs ont le plus bénéficié de l’intégration de l’IA ?
Les secteurs ayant le plus bénéficié de l’intégration de l’intelligence artificielle incluent la santé, la finance, la grande distribution, le transport et la logistique, les technologies de l’information et de la communication, ainsi que l’éducation. En étant data scientist spécialisé dans le domaine médical, je sais que la santé est un des premiers domaines qui a tiré parti de l’IA à différents niveaux. L’IA aide à analyser les images médicales pour détecter des anomalies avec une précision parfois supérieure à celle des médecins humains, propose des traitements personnalisés basés sur les données génétiques, optimise la gestion des dossiers médicaux pour une accessibilité plus rapide et sécurisée, et est intégrée dans les robots chirurgicaux pour améliorer la précision des interventions. De plus, des dispositifs basés sur l’IA surveillent les patients à domicile, collectant des données en temps réel et alertant les médecins en cas de problème, ce qui est particulièrement utile pour les patients atteints de maladies chroniques.
Comment voyez-vous l’avenir de l’IA et son impact sur la société ?
L’avenir de l’intelligence artificielle est très prometteur, avec des impacts potentiels dans presque tous les aspects de la société. Dans notre histoire humaine, nous avons toujours été confrontés à des inquiétudes après chaque innovation scientifique et technologique. Par exemple, lorsque les ordinateurs ont été introduits, beaucoup de gens étaient sceptiques et incertains de leur utilité. Pourtant, les ordinateurs sont devenus indispensables dans presque tous les aspects de la vie moderne. Je vois la même chose avec l’IA, qui est différente des ordinateurs en ce qu’elle repose sur des modèles de calcul statistique évolués, mimant les processus d’intelligence humaine, notamment à travers l’utilisation de réseaux de neurones. Comme les ordinateurs ont libéré les utilisateurs des tâches répétitives, l’IA fait de même de manière plus adaptée et plus robuste, permettant aux gens dans différents domaines de consacrer plus de temps à la créativité et à l’évolution de nos sociétés. L’IA continuera à transformer les industries en automatisant des processus complexes et en fournissant des analyses prédictives avancées. Elle améliorera la qualité de vie en personnalisant les soins de santé, en optimisant les transports, et en fournissant des services éducatifs adaptés aux besoins individuels. Bien sûr, cela nécessite que l’IA soit bien réglementée et gérée, car toute technologie ou invention scientifique peut être utilisée pour le bien ou la destruction de la société.
Quel est votre avis sur l’impact qu’a et aura l’IA sur l’emploi en France ?
L’impact de l’IA sur l’emploi en France sera à double tranchant. D’une part, l’automatisation pourrait entraîner la disparition de certains emplois, notamment ceux impliquant des tâches répétitives et routinières. D’autre part, l’IA créera de nouvelles opportunités dans des domaines comme la gestion des données, la cybersécurité, et le développement d’algorithmes. Surtout, l’IA améliorera la qualité de travail de nombreux utilisateurs actuels en France et dans le monde. L’intégration de l’IA dans différents domaines de travail est inévitable. Ainsi, les emplois futurs nécessiteront des compétences en technologie, en programmation, et en analyse de données. Il sera crucial de mettre en place des programmes de formation et de reconversion pour aider les travailleurs à s’adapter à ces changements, ce qui a déjà commencé en France depuis quelques années. Les secteurs de la santé, de l’éducation, et de la grande distribution, entre autres, verront une demande accrue pour des professionnels capables de travailler avec des systèmes d’IA. En conclusion, personne ne perdra son emploi à cause de l’IA, sauf s’il n’apprend pas à utiliser cette technologie. Ceux qui n’acquièrent pas ces compétences seront remplacés par d’autres personnes dans leur domaine qui savent utiliser l’IA.
Quels sont les principaux défis éthiques liés à l’IA et comment les abordez-vous dans votre travail ?
Les principaux défis éthiques liés à l’IA incluent la vie privée, le biais algorithmique, la transparence et la responsabilité. En tant que data scientiste spécialisée dans l’imagerie médicale, j’utilise des images et des données médicales pour entraîner des modèles de prédiction et de dépistage des cancers de la peau. Dans mon travail, j’aborde ces défis en adoptant une approche proactive. Par exemple, je m’assure que les données utilisées pour entraîner les modèles d’IA sont représentatives et exemptes de biais afin de garantir des diagnostics précis pour tous les patients. Je défends également la transparence dans les algorithmes et les processus décisionnels afin que les professionnels de santé puissent comprendre comment et pourquoi certaines décisions sont prises par les systèmes d’IA, qui sont toujours utilisés comme deuxième avis après le médecin. Mais avant tout, je suis strictement attentif aux questions de confidentialité et de sécurité des données, en utilisant des techniques de cryptage et en suivant des protocoles de protection des données rigoureux pour garantir que les informations sensibles des patients soient protégées à chaque étape du processus.
Quelles sont, selon vous, les opportunités et les défis futurs pour les experts en IA, notamment en ce qui concerne l’évolution de la technologie et de la réglementation ?
Les opportunités et les défis pour les experts en IA varient considérablement en fonction du domaine dans lequel ils travaillent. Que ce soit en finance, en logistique, en marketing ou en médecine, chaque secteur présente des spécificités uniques qui influencent les perspectives d’évolution technologique et de réglementation.
En tant que data scientiste spécialisée dans l’imagerie médicale, je trouve que l’IA offre des opportunités importantes pour transformer les soins de santé. En effet, l’IA permet de personnaliser les traitements, améliorant ainsi la précision et l’efficacité des soins. Grâce à l’analyse de données volumineuses et complexes, nous pouvons développer des diagnostics plus précoces et des thérapies plus adaptées aux besoins individuels des patients.
Cependant, ce domaine comporte également des défis significatifs. La protection de la confidentialité des données des patients est primordiale. Nous devons naviguer avec soin entre l’utilisation de grandes quantités de données pour l’entraînement des modèles et le respect des réglementations de confidentialité. En outre, il est crucial de s’assurer que nos algorithmes sont équitables et ne reproduisent pas les biais présents dans les données. Cela nécessite des processus rigoureux de test et de validation pour garantir la généralisation des modèles.
Un autre défi majeur réside dans la réglementation, qui est en constante évolution. Nous devons donc rester à jour avec les nouvelles lois et directives pour garantir que nos innovations sont conformes et peuvent être mises en pratique en toute sécurité. De plus, l’intégration des technologies d’IA dans les pratiques cliniques existantes peut être complexe. Cela nécessite souvent des formations supplémentaires pour les professionnels de santé et une adaptation des processus cliniques, ce qui peut freiner l’adoption rapide des nouvelles technologies.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui souhaitent se lancer dans une carrière dans l’IA ?
Je conseille d’abord de se former solidement en mathématiques et en programmation, en mettant un accent particulier sur Python, car c’est un langage très répandu et utile pour l’IA. Ensuite, il est important de comprendre que l’IA exige des connaissances dans d’autres domaines. Il faut choisir dans quel secteur vous voulez devenir expert en IA : si vous aimez et avez de l’expérience dans le médical, lancez-vous dans l’IA médicale ; si c’est la finance, optez pour l’IA dans la finance, etc. Cela signifie que les experts en IA, qu’ils soient data scientists, data analysts ou autres, doivent non seulement maîtriser les mathématiques et la programmation, mais aussi bien connaître le domaine dans lequel ils appliqueront l’IA. Enfin, pratiquer beaucoup en travaillant sur des projets personnels et en participant à des concours de data science est essentiel pour acquérir de l’expérience pratique.
Si vous aimez l’IA, n’ayez pas peur de vous lancer. Personnellement, j’avais zéro compétence en programmation – j’avais un doctorat en biologie avant – et je me suis lancé en faisant des autoformations. Puis, j’ai suivi un bootcamp en data chez Le Wagon Marseille, qui a changé ma vie. C’était difficile, mais rien n’est impossible. Il faut juste aimer ce que vous faites, et vous réussirez. Et n’oubliez pas que maintenant, vous avez plus de chances que moi à l’époque. Il n’y avait pas de ChatGPT pour m’aider à coder, alors que maintenant, il est disponible pour tout le monde. Profitez de la technologie pour aller de l’avant et faire avancer le domaine!
- Partager l'article :
