« Utiliser l’IA générative est plus facile que demander du soutien à mon encadrant », confie un doctorant. Cette déclaration illustre une tendance silencieuse mais bien réelle : de plus en plus de doctorants s’appuient sur l’IA pour avancer dans leurs travaux de thèse. Pour beaucoup, c’est devenu un outil aussi quotidien que Word ou Zotero.
Les débats autour de l’IA dans l’enseignement supérieur concernent surtout les étudiants en licence et master. En revanche, les chercheurs en thèse restent souvent en marge des discussions officielles. Pourtant, selon une enquête menée auprès de 75 doctorants répartis dans 19 universités britanniques, plus de la moitié (52 %) utilisent déjà des IA génératives comme ChatGPT dans leur travail de recherche.
Les tâches confiées à l’IA varient largement. Il peut s’agir de la relecture de texte, de la génération d’idées de recherche, des aides à la programmation ou encore la synthèse d’articles académiques. Dans certains cas, des doctorants ont même inclus des passages générés par IA générative dans leurs écrits, sans toujours le signaler. Pour 12 % d’entre eux, ce contenu est déjà intégré dans leur thèse en cours.
Certains perçoivent l’IA comme un partenaire de travail. L’un d’eux la décrit comme « un collègue un peu stupide, mais toujours disponible ». D’autres, notamment ceux pour qui l’anglais n’est pas la langue maternelle, y voient un soutien éditorial rassurant. Pour eux, l’IA est un filtre qui les aide à faire passer leurs idées avec plus de clarté.
Des limites floues entre assistance et délégation
Où s’arrête l’aide bienvenue et où commence la perte d’originalité ? Est-il encore possible de revendiquer la paternité d’un travail si une IA en a reformulé la moitié ? Les doctorants évoquent aussi des problèmes liés à la sécurité des données et aux biais que ces technologies pourraient introduire.
Pour les encadrants, l’usage d’outils comme ChatGPT change la donne. Le rôle du directeur de thèse ne se limite plus à encadrer la méthodologie ou corriger les drafts. Il devient aussi celui qui initie à une utilisation responsable de l’IA générative. Cela suppose parfois une montée en compétence personnelle, pour ne pas se retrouver dépassé par les pratiques de ses doctorants.
Les auteurs de l’enquête appellent à instaurer un dialogue clair dès les premiers mois de la thèse. Parler ouvertement de l’usage de l’IA, des limites à respecter, des outils autorisés ou non et de la manière de signaler leur usage devient essentiel. Comme le rappelle un encadrant : « Est-ce un raccourci pratique ou une délégation du jugement critique ? »
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