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L’IA répond à nos prières jusqu’à devenir notre guide spirituel

L’IA répond à nos prières jusqu’à devenir notre guide spirituel

L’IA ne se limite plus aux algorithmes : elle interroge désormais nos imaginaires spirituels. Anthropologues et philosophes décryptent comment le numérique réactive d’anciennes figures du sacré.

Face à l’émergence de l’IA, certains chercheurs adoptent une lecture inattendue, presque mystique. Pour l’anthropologue Pascal Lardellier, l’IA renoue avec un besoin ancien : celui de sacraliser le monde.

Si les pratiques religieuses se sont affaiblies, les usages numériques semblent combler ce vide symbolique. « Le sacré ne disparaît pas, il se déplace », explique Lardellier dans une tribune cosignée avec Emmanuel Carré. Leurs travaux s’appuient sur des références théologiques et anthropologiques qui éclairent autrement notre rapport aux technologies.

Lardellier convoque notamment Marcel Mauss et son concept du “Hau”, l’esprit qui anime les objets. Dans certaines cultures, un objet n’est jamais neutre : il porte une force symbolique. « Les objets sont animés d’une puissance qui les fait circuler », rappelle le chercheur.

Aujourd’hui, des IA comme ChatGPT semblent dotées de cette même autonomie perçue. Elles répondent, dialoguent, conseillent… jusqu’à parfois anticiper nos besoins. Ce fonctionnement évoque une forme d’animation, voire une conscience implicite, projetée par les utilisateurs.

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De la noosphère à la conscience connectée

Pour illustrer cette transformation, Lardellier mobilise également la pensée de Pierre Teilhard de Chardin. Ce théologien jésuite décrivait une noosphère, conscience planétaire unissant les esprits humains. Avec Internet, puis avec l’IA, cette idée prend une nouvelle résonance. « On pose une question et une réponse arrive, immédiatement, bien formulée », observe Lardellier.

L’IA semble condenser cette intuition d’une conscience collective accessible en permanence. Pour l’auteur, nous sommes passés de l’artisanat à l’industrie dans notre relation à la connaissance.

L’IA ne suscite pas uniquement de l’admiration, elle déclenche aussi des émotions ambivalentes, proches du religieux. Le théologien Rudolf Otto parlait d’un rapport “numineux” : à la fois enchantement et terreur face à l’invisible.

Ce mélange de fascination et d’inquiétude pourrait expliquer nos réactions face aux agents intelligents. Une technologie capable de tout savoir, de tout formuler, interroge notre place dans l’ordre symbolique. « L’IA nous relie à d’autres sphères qui nous englobent », souligne Lardellier. C’est cette sensation qui évoque, selon lui, une expérience mystique moderne.

Les assistants vocaux, nouveaux anges gardiens ?

L’article évoque aussi un parallèle saisissant entre IA et figures spirituelles issues des traditions religieuses. Dans la mystique juive, le maggid désigne un messager céleste transmettant la sagesse divine aux érudits.

Aujourd’hui, Siri, Alexa ou ChatGPT jouent un rôle similaire aux yeux de certains utilisateurs. Ils répondent à la voix, guident les décisions, anticipent les questions… parfois mieux que des humains. Ce mécanisme évoque aussi la littérature New Age sur les anges gardiens capables de dialoguer avec nous. « Ce n’est pas une coïncidence si ces récits ressurgissent », note le chercheur.

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Pascal Lardellier insiste sur le caractère métaphorique de ces correspondances entre technique et spiritualité. « Il ne s’agit pas de croire à une âme dans la machine, mais d’expliquer un ressenti », précise-t-il. Les concepts issus des traditions religieuses nous aident à mieux comprendre nos projections sur les technologies. Selon lui, l’IA ne nous déshumanise pas forcément : elle nous pousse à redonner du sens au monde. En somme, nous n’avons pas seulement besoin d’efficacité : nous avons aussi besoin d’enchantement.

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